Le don fait sa révolution avec les collectes digitales de Just Help

Quand je repense aux meilleurs souvenirs de mon enfance, il me vient à l’esprit ces 21 jours que je passais chaque été en colonie de vacances où je faisais des rencontres marquantes avec des adolescents qui venaient de milieux défavorisés.

Je me remémore également toutes les fois où j’ai aidé ma tante, sœur religieuse, à organiser des collectes alimentaires destinées aux plus démunis.

20 ans plus tard, je lance Just Help, la première plate-forme de collectes alimentaires en ligne et cela est certainement dû à tous ces souvenirs et expériences qui m’ont marqué dans le passé.

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Le choc des cultures en colonie de vacances

Je m’appelle Robert Harfouche et je suis né il y 36 ans à Baabda, une ville située à une douzaine de kilomètres de Beyrouth au Liban.

Je suis issu d’une famille de classe moyenne. J’ai reçu la meilleure des éducations au collège Notre-Dame de Jamhour et à l’Université Saint Joseph de Beyrouth et étant le plus jeune d’une famille de 5 enfants, j’étais toujours chouchouté.

Chaque été, mes parents m’envoyaient en colonie de vacances pendant trois semaines. C’était la seule occasion pour moi de rencontrer des jeunes de mon âge venus de tous bords. Je cohabitais avec des enfants qui venaient du même milieu que moi mais aussi avec d’autres de milieux plus défavorisés. La grande majorité étaient des enfants irakiens ou palestiniens dont les parents avaient fui leur pays d’origine et sont venus se réfugier au Liban sans un sou.

Le choc culturel était de taille. Le séjour nous permettait à nous, enfants favorisés, de réaliser que nous avions une situation de privilégiés face à ces jeunes en détresse qui, pour une fois, jouissaient de quelques jours de confort pendant lesquels ils étaient bien logés et nourris loin de leur dure réalité. Ce qui était remarquable, c’était leur joie de vivre extraordinaire et le fait qu’ils ne se plaignaient de rien. Nous, nous avions tout ce dont un enfant de notre âge rêvait (et même plus) mais on ne manquait pas de se plaindre et d’exprimer notre mécontentement quand quelque chose nous déplaisait.

Ma prise de conscience s’est affirmée avec le temps, quand quelques étés plus tard, je suis devenu moniteur et que je devais prendre en charge un groupe de 10 enfants de milieux sociaux différents. J’avais dans mon groupe un jeune de 11 ans, qui par caprice, tenait à son Nesquik aux fraises au petit déjeuner et qui ne voulait pas manger la même chose que tout le monde. Je devais donc en cachette assouvir à son caprice d’enfant gâté. Mais quand au fil des jours, il a commencé à observer comment les enfants pauvres se jetaient sur le petit déjeuner dont lui n’en voulait pas, il a fini par me demander de prendre la même chose qu’eux.

Le camp était tenu par ma tante, sœur religieuse, mais il était hors de question pendant toutes ces années, que j’aie des privilèges ou que mes vacances soient plus confortables que les autres. (Bon peut être un peu quand même…)

L’apprentissage du don

En plus des colonies de vacances, ma tante organisait régulièrement des collectes alimentaires et j’avais l’habitude de l’aider dans sa mission.

On se rassemblait devant les supermarchés, préparait des cartons de denrées alimentaires qui finissaient par être distribués aux plus démunis.

Moi, qui pensais, qu’il n’y avait que les sans domicile fixe qui en avaient besoin, étais marqué par le fait que les pauvres et les nécessiteux étaient plus nombreux. Même des personnes qui, d’apparence, semblaient être dans de bonnes conditions financières, venaient chercher de la nourriture et nous remerciaient pour ce cadeau, sans lequel ils dormiraient le ventre vide.
La mission de ma tante ne s’arrêtait pas là. Elle faisait appel régulièrement à des cuisinières dans le besoin pour concocter des plats dans un centre social qui ne désemplissait pas. D’une pierre deux coups, elle permettait à ces dames de travailler et aux nécessiteux de manger.

Quand en fin de journée, le travail était fini et qu’on sortait du centre pour rentrer, il nous arrivait de croiser un retardataire qui espérait avoir un repas à la dernière minute. Même s’il n’y avait plus de plats à distribuer, ma tante ne laissait jamais quelqu’un partir bredouille et se débrouillait du mieux qu’elle pouvait pour lui offrir quelque chose.

Ma tante est l’exemple parfait de la femme forte. Je la qualifierais même d’autoritaire et de directive, ce qui pouvait déplaire à certains. Avec l’âge, j’ai compris qu’elle devait montrer ce visage pour cacher la compassion et l’empathie qu’elle avait pour les démunis. Nous étions confrontés à la misère la plus profonde et nous devions nous montrer forts sans trop compatir.

Je n’étais pas de ceux qui faisaient des dons en direct. J’ai vécu longtemps dans le monde des collectes et participé à l’aventure en travaillant physiquement. Ce qui m’intéressait, c’était de fournir un vrai effort humain et pas seulement financier.

Réveiller l’entrepreneur qui sommeillait en moi

En 2007, une maîtrise en Telecom en poche, je quitte le Liban pour suivre un cursus d’ingénieur en France à Telecom Bretagne. Deux ans plus tard, j’étais diplômé et j’ai très vite été recruté par une entreprise de logiciels bancaires. J’ai enchaîné ma carrière professionnelle pendant 5 ans chez Orange où j’étais directeur de projets et chef de projets Telecom.

Bien que mon poste fût satisfaisant, j’avais besoin de plus d’actions et de défis.

Cela coïncidait avec mes trente ans. Je faisais peut-être ma crise de la trentaine !

J’ai décidé de lancer rapidement un projet entrepreneurial avec l’aide de l’essaimage, un programme d’accompagnement initié par Orange.

Je travaillais 7 jours sur 7, parfois 15h par jour et menais une double vie, celle de salarié le jour et entrepreneur la nuit.

J’ai commencé par lancer le service efiester, dont la technologie développée m’a donné envie de créer, plus tard, un autre projet qui germait de plus en plus en moi.

En 2016, en se garant dans un parking avec un ami, on croise des bénévoles de la Croix-Rouge. Il s’en suit une discussion autour des dons. Mon ami m’avoue qu’il préfère aider les nécessiteux directement car en donnant à une association, 60% de son argent sont destinés au fonctionnement de cette dernière, alors que, s’il achète lui-même les denrées, 100% de son don ira à la personne dans le besoin :

J’ai fait plusieurs constats suite à cette discussion :

  • Beaucoup de personnes préfèrent faire un don en nature et directement aux nécessiteux.
  • En ligne, on ne peut donner que de l’argent.
  • Pourquoi ne fait-on pas un don en nature (Donation InKind) en ligne comme quand on achète des denrées alimentaires qu’on se fait livrer à domicile ?
  • Pourquoi je donnerais de l’argent à une association qui elle-même achèterait les denrées alimentaires ?
  • Pourquoi je n’achèterais pas cela moi-même ?

Et c’est là que la plateforme Just Help est née !

Projet arrivé à maturation, bonjour Just Help

Chez Just Help, on veut convaincre ceux qui avaient des appréhensions par rapport aux dons en ligne et les transformer en des donateurs. On est conscient que les dons en nature peuvent représenter un budget colossal et on a découvert qu’ils ne sont pas défiscalisés contrairement aux dons en espèces. On a donc trouvé une solution à ce problème.

Tout le système fonctionne en toute transparence. Pas de marge, pas de conflit d’intérêt et l’argent récolté permet d’acheter les produits collectés au même prix d’achat affiché sur le site avant de les livrer directement à l’association.

En réfléchissant à la manière dont nous allions être rémunérés, nous étions face à quatre choix :

  • Faire payer l’association.
  • Faire de la marge sur les produits.
  • Ajout d’une commission obligatoire mentionnée clairement au donateur (comme le font Leetchi ou GoFundMe).
  • Participation facultative qui permet au donateur de donner s’il le veut la somme de son choix (comme le fait HelloAsso).

C’est cette quatrième option que nous avons choisie car nous considérons que nos actions sont plus d’ordre caritatif que lucratif.

La transparence et cet aspect facultatif constituaient une vraie prise de risque d’autant plus qu’à notre lancement, nous n’avions aucune chance de collaborer avec de grosses associations car le vrai risque pour elles est que tous les dons en ligne se transforment en dons en nature. Où trouveraient-elles l’argent pour assurer leurs frais de fonctionnement ? Cet argent que nous savons nécessaire pour leur survie.

En 2019, on s’est donc fait à l’idée que les alternatives en France ne nous permettaient pas de percer facilement ici.

Au Liban, en revanche, on n’avait pas de concurrence forte et directe, mais les contraintes étaient toutes autres.

Le paiement par carte bancaire n’est pas développé. Le marché était trop petit et le monde du don n’était pas du tout “online”. Mais Just Help était créée et il fallait tenter le coup.

Avec un peu de bouche à oreille, j’ai pu être mis en relation avec 4 associations et nous avons collecté des denrées alimentaires d’une valeur de 60 000 euros très rapidement.

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La crise, une aubaine pour certains business

Peu de temps après, les protestations éclatent et s’en suit une crise économique sans précédent. Il n’était plus possible de retirer de l’argent pour aider les associations ni d’envoyer de l’argent de l’étranger. Pire encore, les denrées alimentaires commençaient à manquer et les prix s’envolaient.

La crise du covid-19, survenue peu de temps après, n’a pas amélioré les choses.

Just Help était donc la solution car tout se faisait en ligne.

Les aides et la générosité des gens ne se sont pas fait trop attendre. Nous avons collecté 300 000 dollars grâce à 1600 donateurs en deux mois.

En voyant minute après minute, les gens contribuer avec des sommes qui varient de 10 à 2000 dollars, moi qui ne faisais jamais de dons, j’ai aussi appris à donner. Il m’a fallu 35 ans pour le faire. Vaut mieux tard que jamais, me diriez-vous !

Le fait d’avoir la possibilité de voir les dons de tous les participants (anonymes ou pas) aux collectes a fait de moi un donateur. Au lieu de le cacher, on doit dorénavant le crier fort à son entourage et cela donnerait envie de suivre l’exemple.

Bonjour, je suis Robert et j’ai donné 10 euros à l’association SESOBEL.

Quand il y a eu la crise, un mouvement d’aide a vu le jour naturellement. Quand ils ont découvert Just Help, beaucoup de personnes sont venues nous proposer leur soutien pour nous faire connaître et sont devenues nos ambassadeurs. C’est ce qui a permis, entre autres, la réussite du projet.

Hello, first I want to say how much I love this initiative ! I know a lot of Lebanese living abroad like myself trying to help out as much as possible, but transferring money to NGOs from abroad is not really practical for us (with the fees etc) so this is perfect !

Just Help a percé suite à une révolution dans la rue mais la vraie révolution pour nous doit être au niveau du donateur.

Le don en nature doit être plus présent. La transparence encore plus.

Un donateur qui donne de l’argent aujourd’hui doit savoir qu’environ 60% par exemple, vont au fonctionnement de l’association. On conçoit que ces frais sont vitaux pour l’association mais ils mériteraient d’être mentionnés clairement.

Comment Just Help, une petite Startup, qui va bouleverser le monde du don, va percer en France ou en Europe ?

C’est seulement le donateur qui a ce pouvoir !